• El harrag

    ou le troupeau de chèvres

     

     

     

    Tous les matins, elles s'impatientaient et piaffaient de derrière la porte d'entrée. C'est quelles voulaient rejoindre leurs copines à la placette, la rahba, où elles se donnaient rendez-vous dans l'attente du Maître qui les accompagnera, tous les jours que Dieu fait, dans une ballade qui durera toute la journée. Nous sortions ensemble de notre demeure, elles pour rejoindre la rahba et nous, nos activités habituelles.Oui, nous habitions ensemble, elles dans une pièce au fond de la cour. Elles faisaient pratiquement partie de la famille et nous en prenions soin, particulièrement nous les petits. Bien sûr, vous qui n'êtes pas de Laghouat, vous ne pouvez savoir de qui, il s'agit...! Eh! bien, je suis en train de vous parler du "harrag" - le troupeau - de chèvres laitières qui partaient tous les jours en pâturage en dehors de la ville, vers les daïas, terrains de culture du blé, sous la conduite et la responsabilité du Pâtre ou Berger. Le notre de Berger venait du coté est de notre grand quartier, le Shettet, poussant devant lui un début de troupeau qui s'étoffera au fur et à mesure pour enfin prendre une dimension assez conséquente à la sortie de la ville. Ces chèvres allaient donc paître et brouter durant toute la journée et elles s'en revenaient le soir le pis bien rempli de lait, une partie pour la maisonnée et une autre pour les chevreaux quant il y en avait. Et souvent, on allait traire juste la quantité de lait nécessaire et le reste restait au pis de la chèvre. Elle servait en quelque sorte de frigidaire et le lait ne risquait pas de tourner...Au retour du pâturage, chaque chèvre, comme une grande, rejoignait son domicile où, nous les petits, la prenions en charge en l'abreuvant et lui apportant l'herbe -el fasfsa- et un peu d'orge. Et c'étaient des charges qui nous faisaient énormément de plaisir...nous rapprochant d'avantage de ces bêtes, pas si bêtes.

    En plus de la tradition, c'est surtout par nécessité, que beaucoup de  familles Laghouties pratiquaient l'élevage caprin domestique. C'est ainsi que presque  toutes les familles possédaient une ou plusieurs chèvres. Le lait produit par ces  chèvres couvrait amplement leurs besoins, en lait et ses dérivés (petit lait, beurre, fromage). Le surplus du lait était offert gracieusement aux familles qui n'avaient pas  de chèvres, ni de vaches, voire même aux pauvres.  

     


    D'ailleurs, il arrivait que les chevreaux s'attachaient à nous et il n'était pas rare de les voir nous accompagner en ville, toujours à nos talons , souvent sautillant de joie et entamant parfois avec nous un début de combat fort gentil...Le mien de chevreau dormait à mes côtés. Nostalgie, nostalgie d'hier !                             Nous ne reverrons plus ces images et peut-être d'autres comme l'outre suspendue aux grilles du jardin public - djenane el baylek - et contenant le lagmi ou lakmi, sève des palmiers, nectar des Dieux, d'une douceur particulière ...qu'il ne fallait pas laisser fermenter au risque de faire pâlir Omar Khayyam. Nous ne voyons plus, le jeu du "sig" - six lamelles de branche de palmier, taillées avec soin, leur vert au dos et blanc du côté opposé - et son complément, le damier aux petites cases creusées à même le sol...Nous ne reverrons plus les parties de toupies et les gestes élégants des joueurs s'acharnant à qui amochera celle de son adversaire...Nous ne verrons plus, ou alors si peu, les mémorables parties de dames entre gens âgés assis sur une"hsira" et n'entendrons peut-être plus leurs commentairesimagés et si riches en poésie...Nous ne verrons plus le jeu du "cheche beche", d'origine turc...Nous ne verrons plus....

     

    1 commentaire de mon ami Mohamed Hadj Aïssa:

     

    Merci, Si Mohammed de nous avoir gratifié de si belles pages d'histoire et de culture de la ville de Laghouat. Nous avons vécu ces belles années dont le souvenir est profondément ancré dans nos âmes et qui continuent de nous apporter quelque réconfort lorsque tout va mal. Oui, je me souviens bien du Harrag (je ne sais pas d'où lui vient cette appellation) : Sublime, l'image de centaines de chèvres noires (en majorité), à la tombée du jour, descendre vers la ville sous un nuage de poussière .Les enfants que nous étions nous tenions au bout de la rue pour attendre, chacun, soit une ou plusieurs chèvres et commence alors une course effrénée vers la maison.

     

     

    Des fois, il arrive qu'une chèvre ne rentre pas avec le troupeau : le malheureux enfant qui se trouve confronté à ce grave problème devra aller à la recherche de la chèvre "récalcitrante" et ne rentrer à la maison qu'en compagnie de la "Reine" (parce que c'en est, véritablement une) sinon il doit s'attendre à une sanction qui lui tombera comme un couperet sur la tête même s'il n' y est pour rien.Pratiquement toutes les familles de Laghouat avaient leur chèvre (au moins une).Les autres, les riches que nous n'étions pas, achetaient du lait de vache de chez Si Mohammed Benmoussa parce qu'ils ne pouvaient pas avoir de chèvre dans leurs si belles maisons , les chèvres c'est pour" le petit peuple". Tout n'est que souvenir : tout a disparu avec nos aînés qui ont vécu heureux malgré la pauvreté et tous les malheurs de la vie sous l'occupation coloniale.Oui, nous ne verrons plus.....                                                                                                         .Merci encore une fois Si Mohammed et à d'autres beaux souvenirs.

     

     

                                                                                      

    Laghouat, poème de Claude-Maurice Robert

    Claude-Maurice Robert

    Alors que j'étais au collège de Miliana, dès 1946/47, lors de chaque vacance scolaire, je tapais à la machine à écrire, les écrits de cet écrivain-poète qui résidait rue de la Grande Séguia (El Kabou) et je cherche en vain à retrouver ses manuscrits ou éditions. Ce sont MM. VALLUIS Léo, exploitant de l'Hôtel Saharien et SOUFI Mohamed, mon ancien instituteur, que Dieu ait leurs âmes, qui me présentèrent à lui.

    LAGHOUAT

    D'opale dans l'écrin d'émeraude des palmes
    Où le vent du désert fait un bruit de marée
    Par ces soirs printaniers, si lumineux et calmes
    Laghouat a des langueurs de vierge énamourée

    De la haute terrasse où sans fin je l'admire
    Les cubes de ses toits font un vaste damier
    Et l'ardeur du couchant fait de chaque palmier
    Un feu d'or crépitant sur un mat de porphyre

    Les sierras sans humus brasillent tout autour
    Et le rocher des chiens avec sa vieille tour
    Que l'ombre qui s'allonge embue et passe à l'encre
    Evoque on ne sait quel vaisseau fantôme à l'ancre

    Heureux, je reste là jusqu'à l'heure où la lune
    Ronde et rouge, émergeant de l'immensité brune
    Fanal au poing de quel secret lampadophore ?
    T'illumine, O Laghouat et rend plus belle encore !

     Claude-Maurice Robert

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  • la svelte Hiziya

    Amis, consolez-moi; je viens de perdre la reine des belles. Elle repose sous terre
    Un feu ardent brûle en moi ! Ma souffrance est extrême.
    Mon cœur s'en est allé, avec la svelte Hiziya.
    "

    "Lorsqu'au milieu des prairies, elle balançait son corps avec grâce,
    Et faisait résonner son khelkhal,
    Ma raison s'égarait ; un trouble profond envahissait mon cœur et mes sens.
    "

     

     

    Lorsque votre serviteur a été visiter la tombe de Hizia, j'ai pris le seul taxi présent l'aéroport de Biskra pour me rendre au cimetière de Douaouda. Et lorsque j'ai demandé à ce chauffeur de taxi le prix de l'aller-retour avec trois heures de présence à Sidi Khaled :

    - Vous avez de la famille là-bas ?
    - Non je viens juste pour visiter la tombe de Hizia !
    - C'est de votre famille ?
    - Non juste que parce que son histoire m'a beaucoup touché et j'essaye de réunir le maximum d'informations sur sa vie
    - Et vous venez d'Alger que pour passer trois heures à Sidi Khaled et revenir ?
    - Oui !
    - Vous ne paierez rien Khouya. Je vous offre cette course. Moi-même amoureux de cette belle histoire, je ne peux que m'incliner devant une telle passion. Offrez-moi juste le repas du midi.

    "Celui qui se perd dans sa passion perd moins que celui qui perd sa passion". Saint-Augustin.

     

     

    hizia

     
     

    أحفار القبور سايــــــس ريـم الـــقور * لا تطيحشي الصخور على حيزيا
    قسمت لك بالكتاب وحروف الوهاب * لا طيح التراب فوق أم مرايــــــــــا


    Ô fossoyeur ! ménage l'antilope du désert
    Ne laisse point tomber de pierres, sur la belle Hiziya !
    Je t'en adjure, par le livre saint,
    Ne fais point tomber de terre sur celle qui brille comme un miroir.

    C'est par ce touchant extrait du magnifique poème de Mohamed Ben Guittoun que le poète a tenté de traduire la tristesse et le désarroi de son ami Sayed suite à la perte cruelle de sa femme Hizia, à l'âge de 23 ans.

    Beaucoup considèrent que le poème de Hizia est un des plus beaux poèmes d'amour écrits à cette époque. La composition de cette élégie, en 1878, n'a rien à envier aux élégies grecque, romaine ou de la renaissance. Ce poème a été commandé par Sayed à Ben Guitoun. Sayed, terrassé par la douleur de la mort de sa bien-aimée, n'a pu trouver les mots pour l'exprimer.

    Et si ce poème a eu tant de succès et a fait l'objet de deux traductions majeures - celle de Constantin Louis Sonneck (1849-1904), et celle du tlemcenien Souhel Dib en 1987- c'est parce que le contexte même de cette belle histoire d'amour favorisait ce triomphe.

     

    hiziia

     
     


    Nous sommes en effet dans les années qui vont de 1855, date présumée de la naissance de Hizia, à 1878, date supposée de sa mort. C'était donc une époque où l'Algérie n'était pas encore totalement "pacifiée" par les colons français. La résistance au colonialisme était marquée notamment par le soulèvement d'El Mokrani, puis du Cheikh El Haddad, le grand maître de la confrérie des Rahmaniya.

    C'est dans ce contexte que Sayed, un orphelin, qui d'après la légende, a été recueilli par son oncle Ahmed Bel Bey, richissime éleveur du Tell algérien et père de Hizia, est tombé amoureux de sa cousine.

    Parce que Hizia reste malgré tout une légende dans l'imaginaire de beaucoup. C'est un beau récit où certains faits historiques sont transformés par l'imagination du poète. C'est une légende dans la mesure où on a très peu de témoignages sur les vies de Hizia et Sayed. La cause et les circonstances du décès de Hizia restent par exemple énigmatiques, et le poème n'apporte aucune précision sinon qu'elle fut subite suite à une halte, à Oued Tell près de Sidi Khaled.

    En 2007, le Dr. SIBOUAKAZ AHMED-BEY affirmait dans un blog qu'il était "un des petits fils de Sayed, mon père était Smaine ben Sayed. A ce titre permettez moi d'apporter une correction importante : Haizia est morte de maladie au retour de toute la famille de Bazer (El-Eulma) au début de l'automne. Elle est morte à Sidi-Khaled (7 km d'Ouled-Djellal) et y a été enterrée. Mon grand-père Sayed a souffert de la mort de Haizia. 5 ans plus tard sa famille arrive à le convaincre pour fonder un foyer (sur la base de la conviction religieuse). Il prit comme première épouse une cousine qui se prénommait Haizia; il s'en sépara pour stérilité. En deuxième noce, il prit pour 2e épouse ma grand-mère Baya Bouakaz qui lui donna 2 garçons Smaine (mon père) et Belgacem, et une fille Etebere. Mon père est enterré dans le carré réservé à la famille Bouakaz dans le cimetière de Sidi-Khaled, où se trouvent les tombes de Sayed et Haizia".

    J'espère avoir apporté quelques éléments importants pour une de plus belle histoire de notre patrimoine culturel national.

    Tout en restant à votre entière disposition recevez mes cordiales salutations."

     
     

    hiziia

     
     

    Ben Guittoun est originaire de Sidi Khaled près de Biskra. Il serait mort en 1907. Bien qu'il ait écrit de nombreux poèmes, c'est celui de Hizia qui l'a fait entrer dans la postérité.

    Le poème débute d'abord une introduction à l'adresse des amis du poète,
    "Amis, consolez-moi; je viens de perdre la reine des belles. Elle repose sous terre
    Un feu ardent brûle en moi ! Ma souffrance est extrême.
    Mon cœur s'en est allé, avec la svelte Hiziya.
    "


    Suit alors une description des jours heureux de Sayed avec Hizia, sous forme de récits :

    "Lorsqu'au milieu des prairies, elle balançait son corps avec grâce,
    Et faisait résonner son khelkhal,
    Ma raison s'égarait ; un trouble profond envahissait mon cœur et mes sens.
    "


    Jusqu'à la mort subite de son amour :

    "Nous avons campé ensemble sur l'Oued Ithel
    C'est là que la reine des jouvencelles me dit adieu
    C'est cette nuit-là qu'elle passa de vie à trépas
    C'est là que la belle aux yeux noirs quitta ce monde
    Elle se tenait serrée contre ma poitrine, lorsqu'elle rendit l'âme
    Les larmes remplirent mes yeux, et s'écoulaient sur mes joues.
    "

    Suit alors une description de son enterrement, qui, pour votre serviteur, reste la partie la plus riche en émotions de ce poème, tant la beauté des mots est sans égal :

    "On l'enveloppa d'un linceul, la fille de notable
    Ce spectacle a augmenté ma fièvre, et ébranlé mon cerveau
    On la mit dans un cercueil, la belle aux magnifiques pendants d'oreilles.
    Je demeurais stupide, ne comprenant pas ce qui m'arrivait.
    On l'emporta dans un palanquin, embelli par des ornements
    La belle, cause de mes chagrins, qui était grande telle la hampe d'un étendard.
    Sa litière était ornée de broderies bigarrées, scintillantes comme les étoiles, et colorées comme un arc-en- ciel, au milieu des nuages, quand vient le soir.
    "


    Et cette résignation face à la volonté divine et devant la fatalité, qui rappelle étrangement le poème "A Villequier" qu'a écrit Victor Hugo suite à la perte de sa fille :

    "Telle est la volonté de Dieu, mon Maître Tout-Puissant.
    Le Seigneur a manifesté sa volonté, et a rappelé à lui Hiziya.
    Mon Dieu ! Donne-moi la patience; mon cœur meurt de son mal,
    Emporté par l'amour de la belle, qui a quitté ce monde".

    hizia

     
     


    L'extrême sensibilité et l'extraordinaire sincérité de ce touchant poème ont été tels que de nombreux interprètes ont chanté le poème de Hizia : Rabah Deriassa, El Bar Amar, Abdelhamid Ababssa, Khelifi Ahmed et récemment encore Réda Doumaz. Mais c'est Khelifi Ahmed qui a transposé cette merveilleuse histoire de Hizia des fins fonds Sidi Khaled en la chantant à l'Olympia de Paris, lui donnant ainsi une dimension internationale.

    Depuis des années, la presse algérienne fait état d'un classement "prochain" de cette histoire d'amour épique de Hizia, au patrimoine national immatériel par la direction de la culture de Biskra.
    Je ne sais toujours pas si cela a été fait.

    Certes la tombe de Hizia a été déplacée au cimetière de Douaouda de Sidi Khaled. Mais cette ville aurait gagné de faire de ce patrimoine une richesse nécessaire au développement de cette très belle région.

    hizia

     
     


    Lorsque votre serviteur a été visité la tombe de Hizia, j'ai pris le seul taxi présent l'aéroport de Biskra pour me rendre au cimetière de Douaouda. Et lorsque j'ai demandé à ce chauffeur de taxi le prix de l'aller-retour avec trois heures de présence à Sidi Khaled :

    - Vous avez de la famille là-bas ?
    - Non je viens juste pour visiter la tombe de Hizia !
    - C'est de votre famille ?
    - Non juste que parce que son histoire m'a beaucoup touché et j'essaye de réunir le maximum d'informations sur sa vie
    - Et venez d'Alger que pour passer trois heures à Sidi Khaled et revenir ?
    - Oui !
    - Vous ne paierez rien Khouya. Je vous offre cette course. Moi-même amoureux de cette belle histoire, je ne peux que m'incliner devant une telle passion. Offrez-moi juste le repas du midi.

    "Celui qui se perd dans sa passion perd moins que celui qui perd sa passion". Saint-Augustin.

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    Qu'il est dommage que vous n'ayez pas connu ce Miliana-là ! Quelle joie de vivre vous auriez éprouvée et que de larmes vous envahiraient à évoquer ce passé.

     Ah ya Miliana mta3 elbareh, Ô Miliana d'hier !

    Miliana, la perle du zaccar

    Images et senteurs du passé.

    Retour nostalgique sur une ville magique….

     

    Ah Miliana! Reverrais-je un jour ton beau visage ? Cette beauté qui hante mes souvenirs ? Quelqu’un pourra-t-i1 te redonner ton aspect, ton cachet ? Petite ville de mon enfance, je souffre pour toi ! Ah ! si je pouvais faire quelque chose, je le ferai, mais…

    Et oui ! Pour le berceau de ma jeunesse, celui de mes parents de mes ancêtres que ne ferais-je pas ? Mais je n’ai aucun moyen, aucun pouvoir hélas ! Je me réfugie dans le passé en me remémorant les souvenirs d’antan. Et les images défilent devant mes yeux. Ta beauté et ta nature si clémente qui faisaient ta renommée : dans le pays même et hors de nos frontières. Tous ceux qui te visitaient tombaient sous ton charme.
    Ton climat, ta verdure, tes sources aux eaux cristallines ont permis la réalisation de trois piscines dont les «Belles sources». Qui ne connaissait pas et ne parlait pas de tes jardins luxuriants ? Tes vergers, tes vignobles aux cépages variés de raisin de table : malaga, ferrana, muscat… tes cerisiers au fruit incomparable, tes figuiers, oliviers, amandiers, pommiers, poiriers, cognassiers… Tous ces arbres qui fleurissaient au printemps et offraient un immense tableau de couleurs, dont les parfums enivrants embaumaient et transformaient ta campagne en paradis terrestre. Et la ville, qu’en dirai-je ?
    Pour te présenter à ceux qui ne te connaissent pas, les mots se bousculent dans ma tête. Ce sont des pages que je noircirai. Nichée à mi-hauteur du majestueux Zaccar, à plus de 700 mètres d’altitude, tu narguais les assaillants qui s’obstinaient à te conquérir, reine du Zaccar ! Comme toutes les villes anciennes, Miliana était protégée par des murailles. Quatre portes y permettaient l’accès : au nord Bab El Blad (Portes du Zaccar, qui étaient doubles : une pour l’entrée, l’autre pour la sortie), c’était l’entrée principale de la ville ; au nord-ouest Bab El Djemaâ, à l’ouest Bab El Gharbi et au sud Bab Yadmer. Celle-ci menait vers Yadmer, Aïn El Barqouq et Zougala, quartiers de la campagne.
    De Bab El Blad, on accède directement à la ville par une belle artère : rue Emir Abdelkader, autrefois rue Saint Paul. Magnifique avenue aux larges trottoirs d’où s’élèvent, jusqu’à nos jours, de majestueux platanes dont les cimes se joignent pour former un dais. Quel ombrage et quelle fraîcheur en été !
    A gauche de l’entrée se dresse le marché couvert (qui attend sa réhabilitation afin que les marchands de légumes et autres puissent réintégrer ce lieu qui leur revient de droit et de ce fait dégager trottoirs et chaussées qui permettront la circulation aisée des véhicules et des piétons. De part et d’autre s’élèvent les constructions constituées d’un rez-de-chaussée réservé aux magasins ou édifices publics (mairie) et d’un étage à habitation. Murs blancs et toits de tuiles rouges. Style de montagne. Cette architecture s’alliait bien à l’environnement.
    Petite ville coquette et agréable. De là, on débouche sur la place de l’Horloge qui n’est autre que le minaret d’une mosquée, Djamaâ El Batha, détruite, comme toutes celles qui existaient à l’époque, lors de la prise de Miliana. La seule mosquée épargnée est celle de Sidi Ahmed Ben Youcef, peut-être grâce à une légende. Face à l’horloge, côté sud, on emprunte un passage couvert Essabat, raccourci qui permet d’accéder à un autre quartier.
    A mi-chemin de cette ruelle, on aperçoit deux portes qui se font face : celle de gauche mène au musée du Moudjahid et celle de droite au musée de l’Emir Abdelkader : belle demeure de style mauresque, récemment restaurée et destinée au musée. L’Emir Abdelkader en fit sa résidence lorsqu’il avait sa garnison à Miliana.
    En quittant Essabat, on continue tout droit pour, enfin, déboucher sur une vaste esplanade la Pointe aux blagueurs, baptisée actuellement place Ali Ammar, nom du chahid Ali la Pointe. C’est une grande place plantée d’arbres. Des bancs étaient disposés tout au long de cet espace limité par les remparts. De ce «balcon» ou «terrasse», notre regard plonge sur un paysage qui s’étend à l’infini. Une vue imprenable, d’abord sur les jardins des quartiers sud : Yadmer, Aïn El Barqouq, Zougala et au-delà, sur toute la plaine du Chelif.
    Une beauté, un calme, une sérénité chassent tout le stress de la journée. Il faudrait réhabiliter ce lieu et lui redonner sa fonction initiale : lieu de détente pour tous ceux qui aspirent à un moment de repos dans un lieu sain où ne domine que la nature : paysage, calme, air pur, fraîcheur. Pas de consommations quelles qu’elles soient dans ces espaces pour éviter toute pollution et dégradation.
    Le jardin public, qui était en réalité un jardin botanique, était un parc de toute beauté. C’était une annexe du jardin d’Essai d’Alger. Des arbres centenaires, d’essences rares, dont il ne reste presque rien, diffusaient une ombre et une fraîcheur douce, très appréciées par les promeneurs en été. Des parterres aux fleurs et aux plantes aussi rares que les arbres égayaient le paysage de leurs couleurs harmonieuses. Un ravissement pour les yeux. Au centre de ce parc, un bassin, aux eaux limpides, abritait des poissons exotiques qui se faufilaient gracieusement entre les nénuphars et autres plantes exotiques. Ils faisaient le bonheur des enfants qui suivaient leur manège d’un regard très intéressé… et ravi.
    Au centre de la ville traîne le mausolée de Sidi Ahmed Ben Youcef, «patron de Miliana». Ce saint, connu autrefois dans tout le pays, est vénéré par la population de la ville et des environs. De nombreux pèlerins venaient tous les ans lui rendre hommage. Ces manifestations se sont raréfiées suite à de nombreux événements douloureux. Les Beni Farh, fidèles, continuent à honorer le saint de leur visite.
    Ainsi, le «rkeb», à chaque fin de printemps, fait son entrée triomphale dans la ville avec «baroud et ghaïta», sous les youyous stridents des femmes et les pétales de roses. C’est une fête très attendue et appréciée de tous. Miliana a toujours été une ville touristique prisée notamment par les étrangers, aussi bien en été, pour sa fraîcheur, qu’en hiver, pour ses neiges, autrefois abondantes. On y pratiquait le ski amateur.
    Il y avait plusieurs hôtels, de grande et moyenne importances, car les visiteurs étaient assez nombreux. Deux hôtels seulement ont échappé à la destruction : le Grand hôtel et l’hôtel de la Poste (qui a été utilisé comme résidence personnelle). Ces deux hôtels sont dans un état de délabrement avancé et ont besoin d’une rapide et sérieuse restauration. Leur remise en service est attendue avec impatience par les amoureux de Miliana.
    Ville défigurée
    De l’ancienne ville, il ne reste que quelques pans, témoins de ce que fut la ville autrefois : ruelles et maisons de style mauresque. Certaines en mauvais état demandent une intervention rapide afin de les sauver de la destruction. La ville a déjà été suffisamment défigurée : habitations rasées et hautes bâtisses érigées, sans aucun style, sans tenir compte de l’étroitesse des rues et trottoirs, ainsi que de l’architecture propre à la ville.
    Ne détruisons pas ! Restaurons ! Gardons, comme partout ailleurs, le cachet de nos villes; c’est notre patrimoine, notre culture. Protégeons nos vestiges, témoins de notre passé riche d’histoire. Bien entendu, la ville étouffe. Il faut penser à l’agrandir sans toucher à ce qu’il y a. Prévoir de nouveaux quartiers, par exemple, vers Oued Errihane où il n’y a pratiquement pas de terres agricoles. Nous avons de très bons urbanistes et architectes qui pourraient faire des miracles : quartiers aérés aux larges artères avec toutes les commodités modernes.
    De grâce, qu’on ne touche pas à la ville ni aux jardins et forêts. Il y a déjà eu beaucoup de dégâts, hélas, irréparables : sur la route d’Alger, la route de Arioua, la route de Khemis, Boutektoun, Louz Beni M’zab, le flanc du Zaccar… un massacre ! Constructions anarchiques. De hautes bâtisses débordant sur les routes étroites avec des balcons qui donnent directement sur la route. On est tout content d’acheter un véhicule, mais où et comment circuler ? Comment remédier à tout cela ? Allons-nous détruire ? Personne n’y pense. Chacun se croit maître à bord, libre de faire ce qu’il veut. Pour Miliana, la situation est dramatique. Qui va mettre de l’ordre dans tout cela et comment ?
    Miliana me fait penser à un navire piraté puis abandonné en pleine mer. Miliana ! que Dieu te vienne en aide et te sauve du naufrage. On rapporte un dicton de Sidi Ahmed Ben Youcef qui dit : «Quand le malheur arrivera aux gens jusqu’au cou, il ne dépassera pas la cheville pour les Milianais.» Espérons que cela se réalise, et que Miliana retrouve son aura.
    Voici un poème sur Miliana, par Moufdi Zakaria, traduit de l’arabe par le professeur Tahar Bouchouchi, extrait de L’Iliade algérienne, tome 1, page 58, composé spécialement à l’occasion du 6e séminaire pour la Connaissance de la pensée islamique à Alger, du 24 juillet au 10 août 1972, lors du millénaire de la fondation de la capitale El Djazaïr, Miliana et Médéa, par Bologhine Ibn Ziri.
    Eclair de la majesté du droit divin, don de la nature, Ibn Youcef(1) a propagé en toi la vertu mais la beauté a orné tes collines ravissantes Le Nid d’aigle(2) est-ce toi ou le Djebel Zaccar ? Le fils de l’aigle t ‘a-t-il emprunté ses côtes ? L’amoureux passionné a-t-il donc fait couler ses larmes aux sources des anassers ?
    La passion a-t-elle eu pitié du fou de Leïla au point que pour lui rendre la raison, elle l’ait aspergé d’eau d’Aïn N’ Sour ?
    (3) Est-ce l’Empereur Pompée qui t’a construite ou Bologhine qui fut ton maître d’œuvre ?(4)
    Nombreux furent ceux qui te convoitèrent mais pour eux tu ne fus pas une proie facile.(5)
    Les Banou Hendel(6) ne trouvèrent aucune quiétude en toi, tandis que Ibn Aïcha connu une fin tragique(7) Tes assemblées comme ton fleuve firent couler les flots de la science et donnèrent la primauté à Ahmed(8)
    C’est pourquoi Yakoub lui offrit le domaine d’Aghmat Certes la générosité est une nature chez les Béni Mérine.
    Note :
    (1)Sidi Ahmed Ben Youcef, saint patron de Miliana
    (2)Le Nid d’Aigle est le surnom de Miliana, comme l’a écrit le docteur Belhamici dans la revue El Açala : Zaccar est la montagne qui domine Miliana.
    (3)Le voyageur Abdari compare l’eau de Miliana à des larmes, (tant elle est limpide) et ses cailloux à des parcelles d’or. «Si, dit-il, on en aspergeait un homme qui a perdu ses facultés, il les retrouverait aussitôt»
    (4)Les historiens sont d’accord pour dire que Miliana est une ville romaine, fondée depuis une époque immémoriale, sur les vestiges d’une ancienne cité grecque. Le général romain Pompée y serait enterré, au côté de son neveu, d’après certaines inscriptions.
    (5)Les Almohades, les Banou Ghania, les Zianides, les Sanhadjites, les Mérinides, les Banou Handal, les Almoravides et les Hafcides se sont longtemps disputé la possession de Miliana.
    (6)Les gens de Miliana seraient originaires des Banou Handal (qui se sont ensuite installés à Warlennes)
    (7)Baqr Ibn Aïcha était le gouverneur de Miliana, nommé par Ali ibn Ishaq. compagnon de Abou Youcef. Mais les gens de Miliana, hostiles à Ipn Aïcha, le combattirent et le firent prisonnier. A la suite de son évasion, ils le tuèrent.
    (8)Abou Abas Ahmed Ibn Ali fut une gloire de Miliana. Savant, juriste, grand poète, il fut honoré par le sultan Yacoub le Mérinide qui lui fit don de la province d’Aghmat au Maroc.
    Chérifa Belabbas-Nabi : professeur de français à la retraite
    EL WATAN le 24.05.12

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  • Pleins feux sur une amie astronaute milianaise

    descendante du Saint Patron de la Ville de Miliana

    Sidi Ahmed Benyoucef

     

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    Un mariage auquel je n'ai pas encore été invité,

    les préparatifs accaparant toute l'attention des tourtereaux

     

                               

     

    Je m'associe à J.Brel pour mes voeux les meilleurs à ces tourtereaux

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    Abderrahmane Aziz. Djawharat Miliana - YouTube

     

     

    Le Mariage à Miliana

     

    Les traditions du mariage, rappellent aussi que jadis, au temps où les moyens de communication étaient inexistants, on recrutait des femmes dites « sèdna » pour faire passer les invitations à travers les différents quartiers de la ville. On évoquera la lourde tâche d'être « neqabba », dont la mission était de rapporter le maximum d'informations sur les fêtes, le plus souvent les mariages. Ceux-ci, à Miliana, étaient aussi célébrés par le futur époux qui était accompagné jusqu'au domicile familial par différentes noubas jouées par la zorna.

     

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     Au cours d'une soirée musicale, la zorna relaie l'orchestre andalou jusqu'au lever du jour en jouant plusieurs noubet (modes musicaux) et tout en respectant les horaires de celles-ci. Vers la fin de la soirée, l'orchestre interprète à l'accoutumée "SallAllah alik ya Mohamed el-Arabi" une kassida de style "Beit ou Siyah" puis " Ebkaou Ala Khir".

    Les grandes noubet jouées aux sons de la zorna à l'occasion de célébration d'un mariage, le marié était accompagné de ses amis et la zorna durant ce trajet dans les étapes suivantes :

    . -Noubet el hammam, trajet du marié vers le bain maure.

    -Noubet el haffaf, chez le coiffeur.

    -Noubet el wali, la visite à la mosquée de Sidi Ahmed Benyoucef.

    -Noubet rana djinek, arrivée au domicile du marié,

    . - puis vient la soirée qui était animée par un groupe de musique chaâbie relayée par la Zorna , et enfin -

    . -Noubet khoudh ma Attak Allah ya Arouss: la rentrée nuptiale du marié où sa mère est la dernière à l'accompagner vers son épouse

     

     

    En musique et par reconnaissance,

    On raconte que vers les années 1930, lors d'un pèlerinage au saint patron de la ville Sidi Ahmed Benyoucef, cheikha Yamna, satisfaite de la guérison de sa fille, anima, en signe de reconnaissance au Wali de Miliana, deux soirées musicales dans l'enceinte de la mosquée, autour de la vasque; la première exclusivement pour les femmes la seconde, le lendemain, pour les hommes.

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    Durant cette dernière, cheikh Medjber accompagnait modestement l'orchestre de la cheikha, qui, très éblouie par la virtuosité, vint le congratuler à la fin du concert

    Après la mort de cheikh Medjber, la relève fut assurée par son élève cheikh El Brazi, son orchestre était composé alors de Bekkoch Mohammed, Ali oussalah M'hamed, Djezzar Braham, Belfoul et Cheikh Abdessamed. Ce dernier prit à son tour le commandement de la troupe avec Sadek Sardoun et Ben hadj ameur Kouach. Leur lieu de répétition était situé dans la cordonnerie Abdessamed près du marché. A cette époque, cette troupe de zorna animait harmonieusement les cérémonies et les fêtes du mawlid Ennabawi en accompagnant les cortèges de m'naret vers la mosquée de Sid Ahmed Benyoucef.

     

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                 Miliana, c'était la cerise  
    Que cet écrit soit un appel à nos édiles municipaux pour une meilleure prise en charge de notre cité et la prépation…de la Fête des Cerises
    gadames.eklablog.fr
     
     
      
       Habib Macharov Habib Macharov :C'est ma moitié elle n'a pas  
    changé que dieu te garde pour nous inchallah.
     
     
     
     
     
     
     
      
     
     

    Habib Macharov Habib Macharov : C'est mon devoir et obligation. 

     

     

    Nous sommes un grand peuple !! l'Algérie n'est pas née du néant , elle est quatre fois millénaire ; grâce à son GRAND PEUPLE elle est toujours là , et pourtant combien elle fût convoitée par un nombre impressionnant d ' envahisseurs ...... Nous sommes ces temps ci en panne de créativité pour aller de l'avant, mais nous n'abdiquerons pas !!! ... Nous avons à réglé bon nombre de problèmes internes, pour ne plus JAMAIS se laisser manipuler par qui que ce soit. Une civilisation n'est détruite par l’extérieur que si, et seulement si, elle est rongée de l'intérieur...

     

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    Le coeur perçoit ce que l'oeil ne voit pas


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  • Layadjouz  aux musulmanes le port du "burkini" en France

    Ce que le FIS exigeait, la France l'interdit !

     

    Le burkini :

     

    Ce qui est Layadjouz pour les unes est permis pour le autres

     

     

    Burkini  pour les femmes et Abaya Kini pour les hommes

     

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